Qu’on le veuille ou non, la chute du Mur de Berlin a été un des moments historiques majeurs de la deuxième moitié du XXe siècle. Si pas le principal. Ce jour-là, en effet, on peut écrire sans exagérer que la face du monde a changé. Et, reconnaissons-le, sans que personne ne s’y attende.
Ce n’était peut-être pas la fin de l’Histoire comme l’a pensé Francis Fukuyama mais certainement la fin d’une histoire. Sanglante, opprimante et dévastatrice.
Aujourd’hui, il se trouve des esprits chagrins pour se plaindre des conséquences de cet événement historique. S’il est vrai que tout n‘est pas parfait, il est incontestable qu’une grande partie de l’Europe a recouvré la liberté ce jour-là et a vu s’ouvrir une vie incomparablement meilleure que celle qu’elle connaissait auparavant. Ce qui ne veut pas dire que les difficultés et les blessures héritées de 45 ans d’oppression et de terreur ont été effacées d’un coup de baguette magique. Bien sûr que non. C’était d’ailleurs impossible. Mais les progrès sont énormes.
Une conjonction exceptionnelle : Reagan et Jean-Paul II
Ce qui est intéressant à observer, c’est que ce virage historique est dû à la conjonction de deux événements qui, au départ, n’avaient aucun lien entre eux : les présences de Ronald Reagan à la Maison Blanche et Jean-Paul II au Vatican. Sans cette concomitance, il est très peu probable que le Mur de Berlin se fût effondré aussi rapidement.
Ce qui, vu avec le recul, n’était peut-être pas tout à fait exact. Les scientifiques russes étaient très loin dans leurs recherches. Mais, du fait même du cloisonnement et du culte du secret du système communiste, il n’y avait pas assez de transferts d’informations entre les différents centres de recherches. Ce qui entraînait des doubles emplois, des gaspillages énormes et surtout des pertes de temps catastrophiques. Devant cette situation, le dirigeant russe crut possible de reformer le système de l’intérieur. Ce qui échoua, comme chacun sait.
Du côté du Vatican, la présence d’un pape polonais ouvert au monde mais terriblement attaché à sa terre natale allait s’avérer déterminante. Le soutien indéfectible du Pape à Lech Walesa et aux ouvriers de Gdansk galvanisa littéralement la Pologne. Et, par effet de tache d’huile, les pays voisins, même si certains étaient plus protestants que catholiques. Le coup d’Etat militaire en Pologne, fomenté par le Kremlin, ne réussit même pas à étouffer le mouvement. On ne ne pouvait tout de même pas massacrer 80% du peuple polonais.
Une réussite incontestable
Aujourd’hui, à l’instar de ce que l’on peut voir en Allemagne, des différences économiques et philosophiques continuent à exister entre les pays libérés du joug communiste et ceux qui vivaient dans la partie libre du continent. Ce qui ne surprend que ceux qui sont de mauvaise foi. Il était et est toujours matériellement impossible de combler en trente ans le fossé économique abyssal qui existait en 1989. Ce qui n’empêche pas de constater combien les situations économiques et sociales des pays libérés se sont considérablement améliorées. Quiconque a été en Hongrie, Pologne, Tchéquie, Lettonie, etc., au cours de ces trente dernières années ne peut que le constater.
N’aurait-il pas fallu “décommuniser” ?
En revanche, une erreur politique a peut-être été commise. A l’instar de ce que l’Allemagne a été obligée de faire après 1945 avec le nazisme, il eut probablement été bénéfique de “décommuniser” ces pays. Autrement dit, d’écarter de toutes fonctions politiques et/ou administratives supérieures les tenants de l’ancien régime. Après tout, il ne s’agissait, ni plus ni moins, que de kollabos. Bien sûr, il ne fallait pas s’attaquer au balayeur de rues qui avait une carte du parti pour conserver son job mais bien aux dirigeants. Est-il normal, par exemple, que même en Allemagne des anciens responsables du terrible SED d’Allemagne de l’Est puissent encore jouer un rôle politique de premier plan au sein du mouvement communiste Die Linke et même siéger au Bundestag ? Et, en Roumanie, combien de sbires du régime Ceaucescu, ne se sont-ils pas recyclés dans des partis apparemment démocratiques ?
Cela dit, il n’en reste pas moins que la chute du Mur de Berlin reste une victoire majeure de la Liberté sur l’obscurantisme marxiste. Qui, pour autant, n’est malheureusement pas mort et oblige à rester vigilants.
Pour autant, ne boudons pas notre plaisir et souvenons-le de la liesse de ce mois de novembre 1989.
J.O.