Si l’élection du président des Etats-Unis est évidemment un événement majeur, on oublie trop souvent que ses pouvoirs sont très loin d’être aussi étendus qu’on le pense souvent en Europe. Pour de très nombreuses décisions, il est dépendant du Congrès. Et, comme on l’a vu encore récemment avec le financement de la guerre en Ukraine, ce dernier a les moyens de s’opposer à un certain nombre de ses décisions, ne serait-ce que par son pouvoir de bloquer tel ou tel budget. A cela s’ajoute le poids de la Cour Suprême, gardienne du Temple.
Pour pouvoir mener sa politique à sa guise, un président américain doit donc disposer de la majorité absolue, tant au Sénat qu’à la Chambre des représentants. Ce qui n’arrive pas souvent et conduit donc à des négociations parfois rudes entre la Maison Blanche et l’un ou l’autre des corps législatifs. Si pas les deux.
Au moment où ces lignes sont écrites, cette situation ne semble pas se présenter : le président élu devant au moins disposer d’une majorité au Sénat.
Vers un protectionnisme pur et dur
Dans la mesure où, contrairement à Mme Harris qui est restée dans le “flou artistique”, le programme de Donald Trump, “Make America Great Again”, est connu. On peut donc déjà voir se dessiner les grands axes de sa présidence.
Ils impliquent un repli en politique internationale et une politique économique protectionniste avec, dans le viseur, la Chine. L’Europe étant très secondaire dans l’ordre de ses priorités. Ce qui confirme ce que nous affirmons depuis des années :l’axe du monde a basculé de l’Atlantique au Pacifique. On peut le déplorer mais c’est un fait. Et la gestion lamentable des dernières crises n’a fait qu’affaiblir et isoler le Vieux Monde. Économiquement et politiquement. Pour s'en convaincre, il suffit de se souvenir de trois points. Primo, les confinements, à la fois criminels (par le nombre de morts) et ruineux (le sinistre “quoi qu’il en coûte” de Macron) au moment de la crise du Covid. Secundo, le Green Plan, si cher à l’”incorruptible” Mme von der Leyen, qui favorise outrageusement la Chine et affaiblit gravement les entreprises européennes (voir l’industrie automobile allemande). Et tertio, les sanctions contre la Russie qui nuisent plus à l’UE qu’à cette dernière, comme les chiffres du FMI le montrent. Et qui, de plus, ont considérablement isolé politiquement l’Europe dans le monde et permis à Moscou de fédérer bon nombre de pays dont le principal point commun est de vomir les Occidentaux. Voir le succès de la conférence de Kazan, il y a quelques jours.
Aujourd’hui, l’Europe va se trouver encore plus isolée qu’il y a une semaine ! Le fait que les relations entre MM. Macron et Starmer et M. Trump soient exécrables ne devant pas améliorer cette situation. Et l’envoi de “bénévoles” du Parti travailliste pour soutenir la campagne de Mme Harris ne devrait pas améliorer les relations entre Londres et Washington. L’isolement de la Grande-Bretagne étant le pire, du fait du Brexit. En revanche, la prudence affichée par Mme Meloni et M. Scholtz devrait jouer en faveur de Rome et Berlin. Réduisant encore, au sein de l’UE, le poids du président français qui n’a pas fini de payer le prix de ses échecs électoraux dont il est le seul responsable.
Enfin, on peut raisonnablement penser que, Trump régnant, les tensions commerciales entre Washington et Pékin vont s’aggraver. Même s’il ne faut pas oublier que M. Biden n’avait abrogé aucune des mesures protectionnistes prises par son prédécesseur et en avait même rajoutées. Notamment dans les domaines des nouvelles technologies et des batteries.
Vers un apaisement militaire ?
En revanche, en ce qui concerne les deux guerres actuellement en cours, il y a lieu d’être (relativement…) optimiste. Au Moyen-Orient, il est probable que M. Trump fera tout pour réactiver les accords d’Abraham qui avaient été son principal succès en politique internationale, durant son premier mandat. En Ukraine, il négociera avec Vladimir Poutine et reviendra probablement au contenu des accords de Minsk de 2015. Dont le respect aurait évité la guerre actuelle.
Une renaissance économique ?
Au plan économique, il va libérer les exploitations des pétrole et gaz de schiste et tout faire pour que les Etats-Unis retrouvent non seulement leur autarcie énergétique mais redeviennent exportateurs nets d’énergie, comme ils l’étaient à la fin de son mandat. Ce qui devrait entraîner une baisse du cours du brut. Une bonne nouvelle pour tous les gens raisonnables du monde. Il va évidemment libérer les entreprises américaines des contraintes écologiques imposées par l'administration Biden. Ce qui risque fort d’encore creuser l’écart avec l’Europe qui préfère assassiner ses industries à coup de réglementations aussi absurdes qu'inutiles et ruineuses.
Néanmoins, une réserve s’impose : l’Histoire montre qu’un protectionnisme outrancier finit toujours par appauvrir toutes les parties en présence.
Coup dur pour le mouvement woke ?
Reste un point encore ouvert : arrivera-t-il à enrayer le fléau du wokisme ? Ce sera peut-être son combat le plus difficile. Mais aussi le plus important car il s’agit de contrer un mouvement de dégénérescence qui menace l’avenir de l’Occident, dans la mesure où il vise non seulement à pervertir les jeunes mais les pousse à essayer des traitements pseudo-médicaux qui obèrent leur santé et leur avenir. Notamment au nom de la répugnante théorie du genre
Le poids de la division de la société américaine
Quoi qu’il en soit, il reste une ombre très noire au tableau : la société américaine sort profondément divisée de ces élections. Et les outrances commises par les deux camps ont ouvert des plaies qui mettront du temps à cicatriser. Ce qui n’est dans l’intérêt de personne.
Jacques Offergeld