Que cherche Bart De Wever ?

Comme nous l'avons déjà écrit, qu’on l’aime ou pas, personne ne peut contester que Bart De Wever soit un homme intelligent, cultivé et un fin politique.

Pourtant, depuis quelques temps, il rate des opportunités majeures et se lance dans des propositions intellectuellement  impeccables mais politiquement dangereuses.

Sa première erreur gravissime a été de ne pas s'opposer à la politique de confinements antidémocratiques qui a aggravé la crise sanitaire et ruiné le pays. Car, en dehors du Covid, on oublie les dégâts faits par ces confinements totalitaires sur la santé mentale de la population et des plus jeunes en particulier. Sans oublier tous ceux qui n’ont pas été soignés, faute de lits d’hôpitaux.

En s’opposant à cette politique suicidaire et en positionnant son parti comme le seul défenseur des droits constitutionnels des citoyens, il aurait à la fois fait montre de bon sens et de légalisme mais surtout affiché un courage politique certain et une vision réaliste de la crise. Certes, dans le climat de terreur délibérément créé par la clique Van Ranst, Vlieghe et encouragé par le ci-devant brûleur de billets de banque, Vandenbroucke, une telle attitude aurait fait scandale. Au début. Mais devant les dégâts générés par leur politique, nombre de gens auraient vu que Bart De Wever avait simplement eu le tort d’avoir raison trop tôt. Le président la NVA a dû se mordre les doigts quand il a vu le triomphe de Mme Diaz-Ayuso aux élections régionales de Madrid (1). Là, Bart De Wever a tout simplement raté un rendez-vous avec l’Histoire et l’opportunité d’apparaître comme un visionnaire.

Un raisonnement économiquement parfait mais politiquement très hasardeux

Comme si cela ne suffisait pas, voilà qu’il se lance maintenant dans des déclarations où il affirme souhaiter, dans le cadre d’une éventuelle disparition de la Belgique, que la Flandre se rattache aux Pays-Bas. Et d’appuyer cette proposition par des arguments économiques imparables. En effet, sur le papier, une telle fusion créerait une puissance économique moyenne sérieuse, des synergies et des économies d’échelle. Le raisonnement est donc économiquement parfait.
En revanche, politiquement, il en va différemment. Bart De Wever, en bon Anversois et bon historien qu’il est, doit certainement savoir que les Flamands et les Hollandais n’ont pas un amour fou les uns pour les autres. Au-delà de la traditionnelle concurrence entre Rotterdam et Anvers, il y a le poids de l’Histoire. Et, plus précisément, des scories des guerres de religion du 17e siècle. Quoi qu'on puisse en penser,  la mentalité flamande reste imprégnée par le catholicisme, tandis que la hollandaise l’est plutôt par le protestantisme. Même si aujourd’hui les églises et les temples sont très loin d’être bondés.

Une proposition vieille de 90 ans !

En avançant cette proposition, Bart De Wever reprend une thèse défendue, avant la Deuxième guerre mondiale, par le Verdinaso de Joris Van Severen (1884-1940). Dans un premier temps, ce dernier proposait la même fusion de la Flandre et des Pays-Bas, avant d’élargir son projet à un « état thiois » qui réunirait Hollande, Belgique, Luxembourg et Flandre française.  Si le Verdinaso connut un certain succès dans les milieux intellectuels de l’époque, politiquement, il n’a jamais vraiment percé. Contrairement au VNV qui, lui, réclamait la séparation de la Belgique et l’indépendance de la Flandre.  
Mais ce n’est pas la seule raison pour laquelle relancer l’idée d’une fusion Hollande-Flandre paraît pour le moins politiquement hasardeux.

Joris Van Severen (1884-1940)

D’abord, parce que pour « se marier » il faut être deux. Et rien ne prouve que les Hollandais souhaitent une telle fusion. Il n’existe en tous cas aucun mouvement structuré qui le propose aux Pays-Bas.

Ensuite, parce que dans le cadre de l’Europe, il est certain que ni la France, ni l’Allemagne ne verraient d’un bon œil l’émergence d’une puissance économique moyenne au bord de la mer du Nord. Et on peut écrire la même chose pour la Grande-Bretagne ; Brexit ou pas, Pour mémoire, ce n’est pas un hasard si, en 1830, aucune puissance européenne ne leva le petit doigt pour empêcher l’indépendance de la Belgique qui affaiblissait le Royaume des Pays-Bas qui, à l’époque, comptait les deux pays. Les régimes changent mais la géopolitique reste…

Enfin, et c’est le plus important, si l’écrasante majorité des nationalistes flamands ne veut plus être belge, elle ne veut pas plus  devenir soudainement hollandaise. Ils veulent être Flamands dans un Etat flamand et souhaitent l'indépendance de la Flandre. Rien d’autre.

Comme il est impensable que Bart De Wever ne connaisse pas ce qui précède, on peut vraiment s’interroger sur  les raisons qui l’ont poussé à s’aventurer sur un terrain aussi périlleux. Avouons que nous n’avons pas la réponse.

J.O.

(1) Voir l’article « Madrid ou la victoire des anti-confineurs » du 11/05/21

Photo Bart De Wever (Wikipedia)